Hans Theys est un philosophe du XXe siècle, agissant comme critique d’art et commissaire d'exposition pour apprendre plus sur la pratique artistique. Il a écrit des dizaines de livres sur l'art contemporain et a publié des centaines d’essais, d’interviews et de critiques dans des livres, des catalogues et des magazines. Toutes ses publications sont basées sur des collaborations et des conversations avec les artistes en question.

Cette plateforme a été créée par Evi Bert (Centrum Kunstarchieven Vlaanderen) en collaboration avec l'Académie royale des Beaux-Arts à Anvers (Groupe de Recherche ArchiVolt), M HKA, Anvers et Koen Van der Auwera. Nous remercions vivement Idris Sevenans (HOR) et Marc Ruyters (Hart Magazine).

Anna Godzina

Anna Godzina - 2020 - A Room of One's Own [FR, essay]
Texte , 1 p.

 

 

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Hans Theys

 

 

A Room of One’s Own (Another Space Electric)

Sur le travail de Anna Godzina

 

 

Anna Godzina (°1990, Chișinău, Moldavie) crée des sculptures et des installations minimalistes et cinétiques qui diffusent de très légers sons à travers l’espace. Ses œuvres se composent d’objets trouvés comme des moteurs électriques, des pièces d’instruments de musique, des tubes et des tuyaux, des cailloux, du bois, du métal, des boulons, des cordes, des roues dentées, des courroies, des ampoules, de l’eau, des lames de scie, etc. Lentement, ils se déplacent et quasi imperceptiblement, leurs adjonctions fleuries à l’espace les remodèlent, les dynamisent et les déploient.

     En 2016, elle a touché un large public avec des performances et des vidéos prégnantes publiées sur YouTube. Cette même année, elle a également réalisé sa première sculpture cinétique, qui a d’emblée attiré mon attention en raison de la rare rencontre entre fonctionnalité et poésie, mouvement non répétitif et son aigu. Progressivement, de nouvelles sculptures ont apparu, toujours avec de nouveaux matériaux, mouvements et sons. En septembre 2019, certaines d’entre elles ont été combinées dans une installation poétique à la galerie de Marion De Cannière (Anvers).

     Il y a quelques années, Godzina a étudié la réalisation de films. La création cinématographique a cependant perdu de son attrait pour elle ; à tout le moins dans sa version classique, car on a la conviction intime qu’elle a malgré tout continué à réaliser des films, mais avec d’autres moyens. Ne reconnaît-on pas le son répétitif d’un projecteur ou le bruit de claquement de la pellicule à la fin d’une projection ?

     On se souvient vaguement d’un empereur aveugle qui avait un grand jardin conçu pour écouter la pluie. Les jardins chinois traditionnels étaient en effet dotés de pavillons de pluie d’où le ou la propriétaire pouvait écouter l’évolution constante du jardin que lui révélaient les mouvements permanents des vents et les gouttes de pluie.

     Ainsi nous parlent les propositions sculpturales et leurs tintements que Godzina dissémine dans l’espace et nous rend apparentes d’une nouvelle manière.

     Simultanément, leurs structures délicates mais fonctionnelles et leurs mouvements élégants nous entraînent dans un monde de plaisir tactile et visuel, de souvenirs d’enfance et de fantaisie.

 

 

Montagne de Miel, le 24 juillet 2020