Gijs Milius - Poppen
Curator: Hans Theys
- Une de ces poupées a été présentée pour la première fois aux Établissements d’en Face, un espace d’exposition bruxellois géré par des artistes, lors de ton exposition individuelle OF/OF OFWEL EN/OF OU/OU OU ET/OU en septembre et octobre 2016. Pour ton exposition individuelle Gezelligheidsvereniging De Bovenkamer à la Galerie Mieke van Schaijk (’s Hertogenbosch, Pays-Bas) qui s’est tenue de janvier à mars 2018, tu as créé quelques poupées supplémentaires. L’une d’entre elles était aussi à voir dans l’exposition de groupe Présent au musée Van Buuren, à Bruxelles, en 2018. L’année suivante, elles ont été réunies pour l’exposition de groupe Vrijheid Vandaag à Aardenburg, aux Pays-Bas. Je me souviens de l’exposition sublime aux Établissements d’en Face : au rez-de-chaussée, on pouvait voir une série de dessins accrochés de manière classique, des évocations dans des couleurs vives d’un univers quelque peu dépaysé. Au centre de l’espace se trouvait une sorte de clôture entourant environ un mètre cube de vide. La forme de cette clôture était empruntée à la rampe d’un des deux escaliers menant le spectateur à l’espace au sous-sol, où cet escalier était fermé par une clôture identique qui prolongeait la rampe. Le visiteur ne pouvait donc pas aller au-delà.
Gijs Milius (°1985) : Au sous-sol, je voulais créer un jardin de sculptures dans lequel on rencontrait des sculptures vues dans les dessins au rez-de-chaussée, comme si l’univers des dessins avait pénétré notre monde. En descendant par l’autre escalier, on traversait le jardin de sculptures dont on faisait partie aux yeux des spectateurs restés derrière la clôture, lesquels se tenaient en quelque sorte sur un poste d’observation.
- D’où vient le titre de l'exposition au M HKA ?
Milius : 'Popper', serait cet acte de pénétrer notre monde. C'est un verbe qui n'existe pas en néerlandais. Le premier titre était ‘Gezelligheidsvereniging en dépôt temporaire au M HKA’, mais cela ne sonnait pas très bien à l’oreille.
- Tu m'as raconté que l’artiste Nicolas Bourthoumieux avait trouvé ta première poupée réalisée pour les Établissements d’en Face sans intérêt et la considérait comme un hommage complaisant à la vulgarité figurative ambiante. Ta figuration paraît cependant n’être qu’un camouflage d’une étrange sorte de bosses ou d’excroissances qui s’imposent à nous sans qu’on le demande.
Milius : Ce n’était pas la première poupée, mais les suivantes qu’il trouvait sans intérêt. Il a toutefois changé d’avis par la suite. Il en a même intégré une dans une exposition de groupe. C’est normal qu’au début, on ne sache pas vraiment ce qu’on voit. Pour moi, une pièce n’est passionnante ou captivante que si l’on ressent la bonne dose de honte lorsqu’on va l’exposer. On a ressenti de l’enthousiasme pour ce qu’on est en train de produire, mais ce qu’on crée au juste n’est pas vraiment très clair. Ce n’est que par la suite qu’on peut constater ce qu’on s’est infligé ce faisant, à soi ou aux autres. Je n’appellerais pas cela un ‘risque’, car il ne s’agit que d’une exposition, bien sûr. Mais il y a bel et bien de la honte.
Hans Theys, Montagne de Miel, 7 mars 2022